Au fil des ans, l’excédent agroalimentaire français ne cesse de se dégrader et concerne désormais toutes les filières. En cause la perte de compétitivité de la ferme France et la dégradation de la parité du dollar par rapport à l’euro.
« La France a terminé l’année 2024 avec un excédent agroalimentaire de 4,9 milliards d’euros (Md€), le plus faible depuis 25 ans, Il n’a atteint que 1,2 Md€ pour les six premiers mois de l’année 2025, soit un recul de 82 % sur cette période », a alerté Thierry Pouch, chef du service économique de Chambres d’agriculture France, lors de la conférence de presse de rentrée de l’organisme consulaire, le 18 septembre. « Nous allons frôler le déficit en 2025, du jamais vu depuis 1978 », a-t-il déploré. Depuis le début de l’année 2025 et jusqu’en juin, la France affiche un déficit agroalimentaire de 1,2 Md€ avec l’Union européenne quand l’excédent avec les pays tiers de 2,4 M€ ne cesse de se réduire. La compétitivité de l’agriculture française ne cesse de s’éroder, déjà perceptible depuis une dizaine d’années, elle s’est brutalement accélérée depuis 2024.
Les fleurons en berne
Ainsi le solde céréalier a fondu de 17 % entre juillet 2024 et juin 2025, à cause d’une baisse drastique des exportations (-16 %), accompagnée d’une progression des importations (+5 %). En cause selon Thierry Pouch, la concurrence de la Russie, les difficultés rencontrées sur le marché algérien et chinois ainsi que le renchérissement de l’euro par rapport au dollar qui pénalise les exportations. Une situation qui risque de durer, Donald Trump ayant fait de la baisse du dollar une politique prioritaire pour redresser le commerce extérieur des Etats-Unis. Idem pour les produits laitiers qui étaient le troisième excédent de la ferme France. Depuis le début de l’année, les importations se sont accrues de 19 %, alors que les exportations ont quasiment stagné (+2 %). Conséquence le solde produits laitiers s’est dégradé de 37 % entre juillet 2024 et juin 2025, au risque que la France devienne déficitaire prochainement. Et que dire de la volaille de chair qui était excédentaire de 200 000 tonnes, il y a 15 ans, aujourd’hui déficitaire de 200 000 tonnes, déplore Sébastien Windsor, le président de Chambre d’agriculture France. Autre fleuron de l’agriculture française, les boissons et alcools. Ici l’excédent de 10 Md€ a eu tendance à s’améliorer depuis le début de l’année grâce à une bonne tenue des exportations. Chambres d’agriculture l’attribue à l’anticipation des opérateurs américains qui ont procédé à des achats de précaution, avant la mise en place des droits de douane de 15 %. Cela étant, si les vins se sont bien comportés, les nuages s’amoncèlent sur les alcools aussi bien vers la Chine que vers les Etats-Unis.
Mobilisation des Chambres d’agriculture
Structurellement négatif depuis longtemps, le solde fruits et légumes ne cesse de se creuser. Les 12 derniers mois écoulés, de juillet 2024 à juin 2025, ont vu le déficit s’aggraver de 84 % pour les légumes et de 11 % pour les fruits. Dans ce secteur, seules la pomme de terre et la pomme parviennent à résister.
Conscient de la dégradation de la situation du commerce extérieur agroalimentaire, les Chambres d’agriculture entendent se mobiliser. D’abord en accompagnant les agriculteurs sur le plan technique et économique, « pour aller chercher tous les euros de compétitivité » et en espérant que la France et l’Europe les soutiennent. Mais aussi en suscitant des projets et des plans d’action sur les territoire ruraux (poulaillers, ateliers d’élevage…). « Il est impératif de retrouver une dynamique agricole, de créer de la valeur, en s’appuyant sur l’industrie de transformation », conclut le président de Chambres d’agriculture France. Un plan en ce sens est en préparation dans l’organisme consulaire : il devrait être présenté en novembre prochain.
La DNC en voie d’éradication ?Concernant la dermatose nodulaire contagieuse (dont un dernier est survenu dans le Rhône le lendemain de cette conférence de presse), Sébastien Windsor, président de Chambres d’agriculture France s’est félicité de la mobilisation de l’État et de ses services pour juguler l’épizootie. A contrario des 11 Chambres d’agriculture, présidées par la Coordination rurale, qui ont dénoncé la politique d’abattage de l’intégralité du troupeau dès l’apparition d’un cas, il a justifié la politique d’éradication mise en œuvre. « L’abattage de l’intégralité du troupeau est très douloureux pour les éleveurs » a-t-il reconnu, « mais c’est la seule solution pour éviter la propagation de la maladie », a-t-il indiqué. « Sans cette politique de dépeuplement précoce et systématique, ce sont 10 % des animaux qu’il aurait fallu abattre », a-t-il poursuivi, jugeant « irresponsable » l’attitude des Chambres d’agriculture concernées. |
Menaces sur le budget de la PACSelon les premières communications de la Commission européenne, le budget de la PAC, pour la prochaine programmation budgétaire 2028-2034 devrait s’établir à 294 milliards d’euros (Md€), contre 386 Md€ pour la période 2021-2027, soit un recul de près de 25 %. En rythme annuel, les dépenses dédiées à la PAC atteindraient 50,9 Md€, contre 65 Md€, selon Chambres d’agriculture France. Les deux piliers actuels disparaîtraient et les dépenses dédiées à la PAC seraient incluses dans le cadre de plans de partenariat nationaux et régionaux. « La PAC serait désormais diluée en tant que politique », déplore Sébastien Windsor, sans aucune garantie sur la pérennité des dépenses qui y sont dédiées. Ce qui ouvrirait également la voie à une renationalisation du budget. « Si tel était le cas, la perte de compétitivité de la France au sein de l’Europe ne ferait que s’accroître, la France ne serait pas en mesure de débloquer des financements nationaux, compte tenu du contexte budgétaire tendu de notre pays », alerte Sébastien Windsor. |



