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DNC : «Nous devons garder la maitrise de la situation sanitaire»

Dominique Chargé, président de La Coopération Agricole. © Photo DR Actuagri
Dominique Chargé, président de La Coopération Agricole. © Photo DR Actuagri

La Commission européenne a validé le 22 octobre la levée de la première des cinq zones réglementées -la Savoie et la Haute-Savoie- pour cause de dermatose nodulaire bovine (DNC) qui est devenue « zone vaccinale », facilitant ainsi les mouvements de bovins entre cette zone et la zone indemne.

Estimez-vous que la politique rigoureuse adoptée par le gouvernement français jusqu’à présent soit la bonne ?

Dominique Chargé, président de La Coopération agricole : Cette approbation par la Commission européenne et les Etats-Membres montrent en effet que la stratégie qui a été mise en place et la solidarité exemplaire de la filière qu’il l’a accompagné sont efficaces. Cette stratégie permet de répondre à un double objectif que nous partageons : éradiquer la maladie d’une part, mais aussi garder la situation sous contrôle et éviter tout dérapage qui mettrait tout le monde à mal. 

La décision annoncée le 17 octobre d’interdire temporairement toute sortie de bovins du territoire métropolitain a cependant beaucoup de mal à passer auprès des éleveurs bovins… 

D.C. : Je comprends bien sûr le désarroi des éleveurs mais je crois qu’on devait malheureusement en passer par cette étape. Nous devons absolument rassurer nos partenaires européens sur notre capacité à gérer la crise et conserver la main sur la gestion sanitaire du dossier, en évitant que Bruxelles n’intervienne pour imposer des règles plus restrictives. La mesure est temporaire (jusqu’au 4 novembre, NDLR) et l’on peut raisonnablement espérer qu’à l’issue de cette période, les débouchés seront toujours là et le marché porteur.* 

Quel rôle peuvent jouer les coopératives dans cette situation ? 

D.C. : Elles sont bien évidemment pénalisées elles-aussi par la situation, car quand il n’y a pas d’activité pour les éleveurs, il n’y en a pas non plus pour les coopératives. Notre devoir, c’est d’expliquer la situation et d’appeler tout le monde à la responsabilité en respectant les règles qui ont été définies. Ensuite, nous avons une responsabilité d’assister les éleveurs qui, pour une raison ou pour une autre, n’auraient pas la capacité de conserver leurs animaux. Les coopératives doivent leur trouver des solutions, en orientant par exemple les broutards vers l’engraissement, dans le strict respect, bien entendu, des règles en vigueur. Nous resterons attentifs aux situations de fragilité. 

Quelles leçons devrait-on tirer de cette crise ? 

D.C. : La situation sanitaire des dernières années, qui met l’élevage sous une pression constante, nous invite à nous interroger sur un système de traçabilité devenu un peu archaïque et en tous cas inadapté à une gestion sanitaire réactive. Il faut s’appuyer sur l’expérience de ces crises successives (FCO, MHE, DNC, etc.) pour accélérer la modernisation de nos outils. Nous, coopératives, plaidons pour accélérer la dématérialisation des passeports et des attestations sanitaires. Alors que tout est prêt pour y parvenir, on repousse sans cesse sa mise en œuvre. 

L’apparition de plusieurs foyers d’influenza aviaire ces derniers jours, qui a motivé la décision du gouvernement de placer la France en niveau de risque « élevé » le 21 octobre montre que le secteur de la volaille n’est pas encore complétement tiré d’affaire… 

D.C. : Oui, cela nous rappelle que les mesures de biosécurité mises en place lors des épisodes de 2022/2023 avaient eu leur efficacité. Mais cela nous montre aussi que le désengagement programmé de l’Etat en matière de financement de la vaccination est particulièrement malvenu. Cette baisse de la contribution des pouvoirs publics de 70 % en 2024-2025 à 40 % en 2025-2026 comporte un risque majeur de démobilisation de certains éleveurs, notamment dans la filière palmipèdes. Sur le fond, les assouplissements décidés par le ministère de l’Agriculture en septembre autorisant la sortie des canards vaccinés même en période de risque élevé nous paraissait une stratégie adaptée. Sur ces dossiers sanitaires, il est important de mener une politique exigeante mais aussi pragmatique. 

* Cette interview a été réalisée peu avant la rencontre entre Dominique Chargé et la ministre de l’Agriculture Annie Genevard et avant la décision du 30 octobre de rouvrir, sous conditions, l’exportation de bovins.