
Comme ils l’avaient annoncé, la FNSEA et JA se sont retrouvés le 26 mai devant l’Assemblée nationale pour faire pression sur les députés, à quelques heures du débat sur la proposition de loi des sénateurs Duplomb et Menonville « visant à lever les contraintes du métier d’agriculteur ».
Une dizaine de tracteurs et une centaine d’agriculteurs venant de toute la France (Occitanie, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Grand Est, Ile-de-France…) se sont retrouvés devant les colonnes du Palais-Bourbon, à l’entrée du pont de la Concorde (Paris 7e). Munis des drapeaux de leurs organisations, les manifestants se sont prêtés au jeu des questions/réponses face à des médias venus nombreux. Cette manifestation est prévue du 26 au 28 mai, de 8 heures à 21 heures avec une rotation de 150 agriculteurs. Mais tout dépendra en fait du vote ou non de la motion de rejet du texte. Si le rejet est adopté, la proposition de loi sera transmise à une commission mixte paritaire (sept députés et sept sénateurs) qui examinera le texte et proposera une nouvelle mouture au vote des deux Chambres. A l’heure où ces lignes sont écrites, la motion de rejet n’a pas été examinée*.
Sur un podium au pied de l’édifice parlementaire, les responsables agricoles ont tour à tour expliqué l’objectif de ce rassemblement qui n’est que le point d’orgue de manifestations ayant déjà eu lieu en province (lire encadré). « Nous sommes ici pour faire aboutir une loi qu’on nous a promise il y a 18 mois (…) La main sur le cœur et une caresse dans le dos, les députés nous ont promis leur soutien lors du dernier Salon de l’agriculture et aujourd’hui, tous se défilent », a lancé Quentin Le Guillous, secrétaire général de Jeunes Agriculteurs. Pestant contre les 3 500 amendements (dont 2 500 rien que pour les députés écologistes et La France insoumise), il a appelé les parlementaires à sortir de l’impasse et d’adopter ce texte. « On ne demande pas le grand soir » , a poursuivi Hervé Lapie, secrétaire général de la FNSEA. Il réclame une simplification du métier d’agriculteur, et de produire à armes égales avec ses concurrents européens. « A marché unique, règles uniques », a-t-il insisté.
« Carte maîtresse »
Décidé à ne rien lâcher, le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, a rappelé les promesses faites par l’exécutif après les manifestations de l’automne 2023 - hiver 2024 et dénoncé « l’obstruction caractérisée » des députés écologistes et LFI. En effet, l’examen des 3 500 amendements entraînerait irrémédiablement un allongement des débats devenu impossible avec le calendrier parlementaire. L’examen de la PPL Duplomb est prévu sur un maximum de cinq/six jours et non de trois semaines comme le nombre d’amendements l’y obligerait. « Derrière le débat, on veut des solutions concrètes », a indiqué Arnaud Rousseau qui fait du slogan « pas d’interdiction sans solution », plus qu’un principe. « Arrêtons de faire peur aux Français. L’acétamipride a été homologué par l’Agence européenne de sécurité sanitaire et elle a reçu une autorisation de mise sur le marché (AMM) de la part de l’Anses** », a-t-il détaillé. « La France est le pays qui consomme le plus d’anxiolytiques et d’antidépresseurs qui ont reçu des AMM et on interdit l’utilisation de l’acétamipride pour soigner les plantes !! », a-t-il accusé. « On demande simplement une dérogation temporaire à cette interdiction le temps que la recherche trouve une solution alternative efficace », a-t-il exposé. De même, a-t-il pointé l’incohérence de certains politiques qui s’opposent à la politique de stockage de l’eau. « Le nord de la France a connu de graves inondations il y a un an et maintenant il connait la sécheresse». « N’aurait-il pas été intelligent de stocker de l’eau pendant cette période d’excédent ? », a-t-il interrogé, demandant d’avancer « de manière pragmatique » sur le sujet. On sentait cependant de l’agacement dans la voix du président de la FNSEA : « On a été patients », a-t-il glissé, avant de demander aux parlementaires et aux politiques de prendre conscience que « l’agriculture est une carte maîtresse pour la Nation ».
(*) La présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet a convoqué une conférence des présidents, le 26 mai à 15 heures. Objectif : discuter avec les présidents de groupe de l’Assemblée nationale et leur proposer une procédure en temps programmé, Celle-ci vise à fixer à l'avance la durée de l'examen d'un texte en séance publique, pour une meilleure organisation des débats. La ministre de l’Agriculture, Annie Genevard a annoncé sa visite auprès des manifestants le 26 mai à 16 heures.
(**) Agence française de sécurité sanitaire.
Plusieurs manifestations en province Dès l’appel à manifester de la FNSEA et de JA pour le 26 mai, des départements se sont mobilisés en province. Ce fut le cas dès le 17 mai dans l’Oise, le 19 mai dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais (avec les blocages temporaires des autoroutes A1 et A2) et dans la Meuse. Dans ce département, le président de la FDSEA 55, Jean-Guillaume Hannequin a réussi à obtenir un entretien avec le président de la République, Emmanuel Macron, après sa visite de l’entreprise Daimler Buses à Ligny-en-Barrois. Les FDSEA et JA des Tarn-et-Garonne et du Lot-et-Garonne ont suivi quand leurs homologues de Charente et de la Haute-Vienne ont rencontré leurs parlementaires. Le 20 mai ce sont les agriculteurs FDSEA-JA de l’Aube qui ont manifesté devant les grilles de la préfecture à Troyes. Ceux de la Seine-Marne ont organisé le 21 mai, une « opération bâchage de radar dans le sud du département, avec plus de 50 tracteurs dans et autour de Fontainebleau ». Les actions se poursuivent en province. |
PPL Contraintes : Après l’adoption de la motion de rejet à l’Assemblée nationale, JA et la FNSEA appellent à fixer, sans attendre, la date de la Commission Mixte paritaire À l’issue d’une journée rocambolesque à l’Assemblée nationale, en préalable à la discussion de la PPL Contraintes, JA et la FNSEA saluent la responsabilité des députés qui ont voté la motion de rejet pour préserver, paradoxalement, la poursuite des travaux du Parlement sur ce texte. Après la tentative des députés des groupes écologistes et LFI de couper court à l’adoption de la proposition de loi en déposant un nombre d’amendements ne permettant en aucun cas de terminer l’examen du texte dans les délais prévus, pourtant annoncés de longue date, et après le dépôt d’une motion de rejet ce week-end par le rapporteur, Julien Dive, une conférence des présidents de groupes politiques de l’Assemblée nationale, réunie dans l’urgence cet après-midi, a examiné l’option pour une procédure de « temps législatif programmé » signifiant que le temps de débat serait limité à 15 h maximum sur le texte. Cette proposition a finalement été rejetée quelques minutes seulement avant le début du débat au regard de la discussion dégradée qu’elle engendrait et qui, finalement, ne convenait à aucun groupe. Sans cette motion de rejet, il était certain que l’examen du texte ne pouvait s’achever avant la fin de la semaine et qu’une nouvelle fois les agriculteurs allaient être pris en otage par les manœuvres politiciennes et devraient encore attendre pour bénéficier de la concrétisation des engagements qui datent déjà d’il y a 18 mois… JA et la FNSEA saluent donc ce vote des députés, tout en regrettant l’incapacité de l’hémicycle à mener des débats apaisés et constructifs. Pour JA et la FNSEA, l’objectif est clair : le texte doit désormais être adopté au plus vite et en tout état de cause en amont de la fin des travaux parlementaires de l’été. Pour cela, nous* appelons le Gouvernement à annoncer immédiatement la date de la Commission Mixte Paritaire. Les agriculteurs, mobilisés au cours de ces derniers jours, perdent patience. *Communiqué de presse FNSEA - JA, Paris, le 26 mai 2025 |
