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Thierry Mourot : la récolte de l’herbe, « la clé de réussite de la future campagne laitière »

Célestin, étudiant ingénieur agro, vient prêter main forte à son père, Thierry Mourot, à l’heure de la récolte de l’herbe. Photo : JL.Masson
Célestin, étudiant ingénieur agro, vient prêter main forte à son père, Thierry Mourot, à l’heure de la récolte de l’herbe. Photo : JL.Masson

A l’ouest-vosgien, Thierry Mourot a entamé la saison de l’herbe, après un arbitrage technico-économique dicté par la conjoncture météorologique et la flambée du coût des intrants. L’option qualité l’a emporté sur celle du volume, en tablant sur un peu d’eau pour des repousses ; et en activant l’outil de l’enrubanné.

Thierry Mourot est installé à Moncel-sur-Vair, dans la vallée de la Meuse à l’ouest des Vosges. L’exploitation, en bio depuis 2001, compte 112 ha, dont seulement 30 ha de terres labourables consacrées aux cultures et prairies temporaires, le reste demeurant en prairies naturelles. Les 50 vaches laitières Prim’Holstein et Montbéliardes concourent à la production d’un lait voué à la transformation en un fromage bio dédié à une clientèle allemande, par la fromagerie Bongrain-Gérard du Tholy. Quelques bœufs issus du troupeau sont engraissés. Les céréales sont intégralement autoconsommées, sur la base essentielle de mélanges triticale-pois.

« Je recherche l’autonomie alimentaire », indique l’éleveur, en se fixant « l’objectif d’alterner trois années de prairies temporaires et deux années de céréales ». Un optimum pas toujours aisé à atteindre, compte tenu des aléas météorologiques. La conduite de l’herbe est toujours un peu compliquée. Cette année, Thierry Mourot est confronté à une autre problématique. « La semaine du 10 mai, il n’y avait pas d’urgence à faucher les prairies permanentes (PP), ni en termes de volume, ni d’épiaison », considère-t-il. Il a pourtant suivi les conseils du bulletin de la pousse de l’herbe qui invitaient à miser sur la qualité en début de saison, en décidant d’enrubanner une partie du parcellaire.

« Fourrage exceptionnel »

Un véritable arbitrage technico-économique, tenant compte à la fois du stock de foin et regain reconstitué lors de la précédente campagne (aspect volume), de la flambée du prix du plastique (la bobine est passée de 67 € à 100 €) et de l’économie potentielle sur le concentré (aspect qualité) ; le correcteur azoté bio, un mélange soja-tournesol, a explosé de 600 à 1.000 €/t. Les rendements sur PP s’avèrent « très hétérogènes, de 2 à 3 t de matière sèche par ha, en dépit d’un fourrage exceptionnel ».

Thierry Mourot a également commencé à faucher les trèfles qui produisent un peu plus de volume « et une qualité tip top », en misant aussi sur un orage salvateur qui permettrait des repousses pour une deuxième coupe fin juin. La technique « révolutionnaire » de l’enrubannage a permis à la fois d’étaler les pointes de travail, en gagnant en autonomie et en qualité du produit. S’il utilise une enrubanneuse d’une vingtaine d’années largement amortie, l’éleveur vosgien vient d‘investir dans une faucheuse frontale, pour progresser encore en autonomie et en rapidité. Pour lui, la récolte de l’herbe, c’est « la clé de réussite de la future campagne laitière ».

 

 

Les externalités positives de l'herbe

Très engagé professionnellement, Thierry Mourot revendique volontiers cette « Culture de l’herbe » initiée à la fin des années 80 dans les organisations professionnelles vosgiennes. Actuellement vice-président de la Fdsea et de la Chambre d’agriculture 88, il siège à la Frsea et à la Chambre du Grand Est qu’il représente à l’Apca sur les questions d’agriculture biologique.

Plusieurs outils, initiés par le réseau consulaire, sont accessibles aux éleveurs : le groupe herbe, le groupe Facebook autour du bulletin de la pousse de l’herbe, un service d’appui technique, en parallèle avec le service nutrition… L’élu défend cet « élément-clé pour l’élevage », face aux positions « des extrémistes qui critiquent notre métier ». « Paradoxal » pour lui, car « l’élevage lorrain n’a rien à voir avec celui des Etats-Unis ». Thierry Mourot en rappelle les externalités positives : « l’énorme puits à carbone » ;  les éléments remarquables pour la biodiversité : herbe-haies-bosquets ; l’entretien du paysage… Tout en regrettant « que les élus des collectivités n’aient pas forcément la bonne approche de l’agriculture ; Ce qui peut être véhiculé est souvent éloigné de la réalité de nos territoires. Vouloir aller dans le sens des circuits courts est honorable, mais nous ne pourrons pas tous vendre des caissettes à la ferme. Il y a de la place pour une agriculture diverse et multicartes ».