
L’institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE) a dévoilé, le 17 février, lors d’une conférence de presse à Paris, les orientations qu’elle présentera notamment sur le Salon international de l’Agriculture.
Ce sont environ 15 000 agriculteurs qui passent bon an mal an sur le stand de l’INRAE au Salon international de l’Agriculture. Les questions qu’ils posent aux 200 chercheurs qui se relaient tout au long des dix jours du 1er salon de France sont récurrentes : « Quelles sont vos solutions » pour telle ou telle problématique ? Elles concernent en grande majorité la protection des cultures (grandes cultures, arbres fruitiers, légumes,…) mais aussi les maladies vectorielles qui n’ont pas épargné les troupeaux depuis quelques mois (tuberculose, fièvre aphteuse, FCO, MHE*…). Viennent se greffer d’autres contraintes comme le changement climatique et la nécessité d’avoir des solutions efficaces, alors même que l’Etat vient à restreindre, bien souvent au nom d’une écologique dogmatique et punitive, un bon nombre de molécules. « Nous sentons bien depuis quelques années émerger une forme d’inquiétude chez les agriculteurs sur le changement climatique, face à une concurrence internationale qui n’est pas toujours équitable », a précisé le PDG de l’INRAE, Philippe Mauguin. Comme toujours, il n’existe pas une solution miracle et universelle mais « un bouquet de solutions que nous mettons au point avec les instituts techniques agricoles, les industriels, les start-up pour passer de la recherche fondamentale à la recherche appliquée », a-t-il ajouté. Pour ce faire, l’INRAE dispose de fermes pilotes et expérimentales couvrant au total plus de 7 000 ha à travers toute la France en grandes cultures et en élevages. En nouant des partenariats avec les instituts étrangers au nombre de 200 partenaires mondiaux, l’INRAE essaie de raccourcir les délais et de multiplier les solutions efficaces.
Phéromones et kairomones
« Nous travaillons sur un vaccin universel contre la grippe aviaire », a indiqué Isabelle Litrico, directrice scientifique de l’INRAE. Ceux actuellement sur le marché ne parviennent pas à fixer la protéine du virus H5N1, « ce qui limite leur efficacité », a-t-elle détaillé. Une nouvelle formulation avec des nanoparticules devrait le rendre à terme 100 % efficace.
De même, l’INRAE s’est penché sur le mildiou et l’oïdium, deux champignons qui s’attaquent régulièrement à la vigne. « L’objectif est d’avoir des variétés résistantes à ces deux parasites », a indiqué Isabelle Litrico. Neuf de ces variétés sont actuellement sur le marché et trois autres devraient bientôt être homologuées. D’une manière globales, ces nouveaux cépages permettent de réduire d’environ 80 % les traitements fongicides.
Les recherches menées pour lutter contre la septoriose du blé ou la rouille brune progressent avec la mise au point d’une nouvelle variété de blé tendre d’hiver, Géopolis, qui vient d’être validée par Agri Obtentions**. Pour réduire les volumes de produits phytosanitaires, l’Institut cherche à développer des solutions alternatives aux insecticides, en travaillant sur les phéromones (émises afin de véhiculer un message entre individus d'une même espèce) et les kairomones (émises par des êtres vivants afin de déclencher une réponse chez des individus d'autres espèces).
Les chercheurs travaillent sur des médiateurs chimiques susceptibles de modifier les comportements des insectes, en agissant sur leurs récepteurs olfactifs. Ils sont ainsi parvenus à mettre au point une solution répulsive pour le puceron à l’origine de la jaunisse de la betterave. Cette biosolution est au point « mais les autorités européennes considèrent qu’elle entre dans le champ juridique des produits phytosanitaires », s’est désolée Emmanuelle Jacquin-Joly, directrice de recherches à l’INRAE. « Il faut maintenant trois millions d’euros et dix ans pour obtenir l’autorisation de mise sur le marché du produit », a-t-elle précisé. Une attente d’autant plus injustifiée que les molécules chimiques de cette biosolution agricole sont autorisées dans les crèmes glacées et les crèmes solaires. Reste à savoir quelle solution pourront trouver les chercheurs pour rendre compatible le temps politico-juridique et le temps agricole. Mais ces travaux ne rentrent malheureusement pas dans le champ des compétences de l’INRAE.
(*) Fièvre catarrhale ovine ; maladie hémorragique épizootique.
(**) Créée en 1983, Agri Obtentions, filiale de l’Inrae, est une société indépendante qui a pour mission la création et la valorisation d’innovations variétales.