Face au changement climatique en action, la Région Grand Est veut développer des stratégies pour anticiper les problèmes. Alors que ces évolutions climatiques ne sont pas entièrement entrées dans les moeurs, exemple de cette volonté autour de la ressource en eau, lors d'un colloque à la Madine.
Une des clés de l’adaptation aux évolutions du climat se situe dans le partage raisonné des usages de la ressource en eau, annoncée se raréfiant. La Région Grand Est se préoccupe du sujet depuis plusieurs années. Elle organisait les deuxièmes rencontres régionales de l’eau, le 22 octobre, au bord du Lac de Madine, à Heudicourt-sous-les-Côtes, en partenariat avec les trois Agences de l’eau qui irriguent son territoire. Près de trois cent cinquante acteurs publics et privés sont venus s’informer et témoigner au cours de cette journée, émaillée principalement de trois table rondes qui ont suivi le propose introductif de Franck Leroy, le président du Grand Est.
La ruralité principalement exposée
Si le volume d’eau disponible sur la région est conséquent, les épisodes récents de sécheresse ont révélé des tensions sur la disponibilité en eau potable. En 2022, par exemple, 135 localités ont été confrontées à des problèmes volumétriques, mais aussi qualitatifs, au préjudice de 78.000 habitants. 45 autres communes ont été plus durement exposées, devant déclencher des mesures exceptionnelles de citernage, interconnexion exceptionnelle, voire coupure d’eau, pour servir leurs quelque 15.000 ressortissants. La ruralité est principalement exposée. La Région a enclenché une politique de préservation et de reconquête de la qualité de l’eau. Elle participe, au côté de l’Etat, à la définition d’une stratégie régionale captage. Enfin, dans son plan d’adaptation au changement climatique 2023-2028, elle a « identifié un enjeu d’appui aux interconnexions de réseau d’alimentation en eau potable structurantes ». C’est pourquoi elle peut soutenir financièrement les groupements de communes ou syndicats évoluant dans la ruralité pour remettre à niveau leurs infrastructures de distribution d’eau potable.
Actuellement, les consommations en eau sont stables, mais elles pourraient augmenter à terme, pour répondre aux besoins de l’énergie et de l’agriculture. Avec un pic de demande à certaines périodes de l’année. La Région craint « des étiages plus sévères dès le printemps… des crues tardives et intenses ; un décalage de la recharge des nappes ; de fortes incertitudes sur la possibilité de remplir les lacs-réservoirs, et une augmentation de la température moyenne des eaux des lacs et rivières ». Face au constat, l’intensité de ces changements sera fonction de la capacité collective « à favoriser l’infiltration vers les nappes… et à structurer les nécessaires économies d’eau ».
Grand Est Région Verte
Les travaux de ces « rencontres » ont principalement été orientés autour de trois table rondes. La première s’est attachée à promouvoir la sobriété et réduire les impacts, en s’appuyant sur les infrastructures naturelles. La deuxième s’est penchée sur l’adaptation et l’optimisation des aménagements existants, pour lesquelles la gouvernance et la connaissance des ressources seront déterminantes. Enfin, la dernière a porté des « regards croisés » sur les nouveaux ouvrages, en réfléchissant à la multifonctionnalité, la durabilité et l’acceptabilité sociale des projets.
Le Grand Est a décliné le plan eau national décrété en 2023, dans la COP régionale « Grand Est Région Verte ». Avec les lignes de conduites de la sécurisation de l’alimentation en eau potable ; de l’amélioration de la gestion quantitative dans les sous-bassins et de la qualité des eaux de captage et de la préservation-restauration des zones humides ».
CHIFFRES-CLÉS POUR LE GRAND EST Ce qui coule de source - Sur les 1.200 millions de m3 annuels d’eau prélevés, 124 vont à l’agriculture, 431 à l’alimentation en eau potable et 645 à l’industrie. - 290 milliards de m3 annuels d’eau sont utilisés par l’hydroélectricité sur un total de 296 milliards. - Entre 92 et 96 % du volume utilisé pour la production d’eau potable sont prélevés dans les nappes souterraines. - 7 millions de Belges et Hollandais sont alimentés en eau potable par l’eau du fleuve Meuse qui quitte le Grand Est à Givet, dans les Ardennes. - Le Grand Est recèle 4 lacs de plus de 1.000 ha, 60 plans d’eau de plus de 50 ha, 3.255 étangs et plans d’eau, 52 nappes souterraines, 21.000 km de cours d’eau. - 76 % de l’irrigation sont prélevés sur le bassin du Rhin, et 16 % sur celui de la Seine. Les prélèvements sont insignifiants sur la Meuse, la Moselle et la Saône. |
Ils ou elles ont dit Sophie-Charlotte Valentin, directrice territoriale Voies Navigables de France : «Nous essayons de maximiser le volume de stockage disponible pour des usages agricoles. Il pourrait passer de 35 M de m3 à 50 m. sur le Nord-Est». Vincent Bartoli, responsable process sucrerie Cristal Union : «Nous investissons 25 M€, aidés à 40 %, pour économiser un million de m3 d’eau par an, en récupérant les 75 % d’eau contenus dans les betteraves pour nos besoins industriels. Notre défi est de rendre autonomes sucreries et distilleries». Charlène Descollonges, ingénieure hydrologue, grand témoin des rencontres : «Un rapport de l’Assemblée nationale privilégie les retenues collinaires aux méga-bassines pour le stockage. J’en appelle au changement de modèle agricole pour sécuriser la production plutôt... qu’un outil de production». Béatrice Moreau, vice-présidente du Conseil régional : «L’objectif du SRADDET Grand Est était de réduire de 20 % la consommation en eau entre 2016 et 2030. Nous sommes déjà à 17 %, mais, il faut rester humbles et continuer les efforts, dans le cadre d’une gouvernance collective». |