Deux heures après les annonces gouvernementales, la FNSEA et JA organisaient à Paris, le 1er février, une conférence de presse pour commenter ce plan de mesures, appeler à changer de « mode d’action syndicale » et à suspendre les blocages. La vigilance reste de mise rue de la Baume, siège du syndicat majoritaire.
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Encadré : Un mouvement responsable
« On ne va pas résoudre en dix jours l’histoire des vingt dernières années agricoles », a résumé Arnaud Rousseau, le président de la FNSEA. Avec Arnaud Gaillot, président JA, Pierrick Horal, secrétaire général JA et Hervé Lapie, secrétaire général de la FNSEA, Arnaud Rousseau avait auparavant rendu hommage à Alexandra Sonac et sa fille Camille toutes deux fauchées le 22 janvier à Pamiers (Ariège) en marge d’une manifestation. La messe d’adieu se déroulait à l’heure où débutait la conférence de presse.
Nouveau cap
L’objectif de « changer de logiciel », selon la formule des deux syndicats agricoles, semble avoir été compris au plan français. Arnaud Rousseau a d’ailleurs salué « des avancées tangibles » et les qualités « d'écoute » du chef du gouvernement « pour essayer de comprendre ce que sont nos enjeux, nous recevoir, échanger, discuter et finalement annoncer en plusieurs salves des mesures d'urgence ». Reconnaître l’acte de production, la souveraineté alimentaire et le revenu, « ce sont des éléments intangibles de l’avenir de notre métier », a-t-il précisé. A ce titre, la FNSEA et JA estiment avoir été entendus sur un certain nombre de points plutôt conjoncturels comme l’abandon de la réforme du gasoil non routier (GNR), les indemnisations sanitaire et climatique (MHE, inondations, gel, sécheresse…), et le versement rapide des dernières aides PAC. « Pour les deux organisations agricoles, le gouvernement a semble-t-il compris que le nouveau cap était celui de la souveraineté, de la production et d’une politique agricole qui s’assume ».
Surdité de Bruxelles
Arnaud Rousseau reste cependant plus dubitatif sur l’attitude de Bruxelles qu’il accuse de « surdité ». Ne comprenant « rien, ni aux ressorts ni à la vision de cette Europe technocratique », il s’inquiète de l’« incompréhension grandissante entre une technostructure murée dans ses bureaux à Bruxelles et les réalités de ce que nous vivons dans nos exploitations ». Le président de la FNSEA accuse même la Commission européenne qui prend des décisions qui ne « respectent pour le travail des agriculteurs ». Or le combat des agriculteurs est intimement lié à ce qui se passe à Bruxelles, a-t-il répété.
Pour JA, les annonces gouvernementales vont aussi « dans le bon sens », notamment l’inscription de la souveraineté alimentaire dans la loi, le rehaussement de certains seuils fiscaux pour favoriser l’installation et le contrôle renforcé de la loi Egalim, que ce soit sur le respect de la matière première agricole ou encore l’origine France. De même estime-t-il opportun que le gouvernement ait suspendu Ecophyto et qu’il accélère l’examen de la proposition de loi de la députée Nicole Le Peih (Renaissance, Morbihan) sur les troubles du voisinage.
Le mouvement se transforme
C’est pourquoi, après consultation de syndicaux locaux, la FNSEA et JA ont décidé de suspendre les blocages. « Mais sous condition », s’est empressé de préciser Arnaud Gaillot. « A condition que le gouvernement nous donne rapidement une synthèse écrite de ses annonces », ont précisé les deux présidents qui donnent peu de temps au Gouvernement pour agir : Ce document devra leur être présent avant le Salon. Autrement dit, la vigilance reste de mise au sein des deux organisations syndicales qui changent de mode d’action. Le « mouvement ne cesse pas. Il se transforme », « Dès lundi, on va se mettre au travail dans les préfectures, dans les ministères, pour aller travailler tous les points qui ont été annoncés, pour aller voir comment on les met en application, comment on fait pour que ça se concrétise réellement sur le terrain », a indiqué le président des JA. Il faudra aussi que les premiers résultats soient tangibles au Salon de l’Agriculture. « C’est un marqueur fort », a estimé Arnaud Gaillot. S’ils n’étaient pas remplis en temps et en heure, les agriculteurs seraient prêts « à rentrer dans un mouvement de mobilisation d’ampleur général ». Ils ont encore le pied sur l’accélérateur du tracteur…
Un mouvement responsableSelon la FNSEA et JA, selon environ 40 000 agriculteurs qui ont été mobilisés ces derniers jours, et le mouvement de renversement des panneaux (« On marche sur la tête ») en octobre dernier. « Cette mobilisation s’est distinguée par son esprit de responsabilité (…) Elle a regroupé énormément d’agriculteurs et beaucoup de jeunes. Ça nous a frappés, ils veulent prendre aussi l’avenir de leur métier en main », a estimé Arnaud Rousseau. Il s’est également ému des nombreux messages reçus : « Nous sommes très touchés du soutien que nous apporte l’ensemble de la nation. Beaucoup de messages de soutien sur le terrain, beaucoup de messages d’accompagnement, de compréhension (… ) Pour nous qui sommes engagés depuis près de vingt-cinq ans, c’est la première fois qu’on ressent de manière quasiment charnelle ce soutien des Français », s’est félicité Arnaud Rousseau. Il a invité ses adhérents à se replier en « bon ordre » et à « rentrer dans les fermes en toute sécurité ». |