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Quelles perspectives pour l’élevage allaitant ?

L’exploitation en système naisseur-engraisseur avec production de jeunes bovins compte une centaine de vaches charolaises ©Marion Falibois
L’exploitation en système naisseur-engraisseur avec production de jeunes bovins compte une centaine de vaches charolaises ©Marion Falibois

Jean-Paul Fontaine est président de la section élevage à la FDSEA 88 et éleveur de vaches allaitantes installé sur la commune de Frain.

L’EARL de l’Horizon est une exploitation unipersonnelle avec emploi la main d’œuvre salariale. L’exploitation en système naisseur-engraisseur avec production de jeunes bovins compte une centaine de vaches charolaises pour une SAU de 215 ha dont 115 ha labourés et 90 ha en herbe.

Dans quel contexte se trouve la filière viande actuellement ?

Jean-Paul Fontaine : "Avec des années antérieures où les revenus des producteurs de viande rouge étaient très faibles, qu’ils soient naisseurs ou naisseurs-engraisseurs, nous partons avec un handicap. Comme les exploitations ne génèrent plus de bénéfices, elles sont vieillissantes et ne peuvent pas investir. Ce qui est d’autant plus problématique en sachant que la moyenne d’âge des éleveurs en viande est encore plus élevée que celle en lait : 46% des bovins allaitants sont détenus par des éleveurs de plus de 55 ans.

En 2022, les marchés ont pris 20% d’augmentation voire plus pour la viande issue de troupeau laitier. C’est la conséquence d’un problème de disponibilité. Tout au long de l’année cela a été la course à l’augmentation de du prix de la vache de réforme issue du troupeau laitier tout simplement parce que la filière avait besoin de ces animaux.

Même si 2022 a été une bonne année, les précédentes ont été très compliquées. En six ans nous avons perdu 11% du cheptel. Ce phénomène de décapitalisation s’explique par le manque de rentabilité qui existe depuis longtemps dans notre filière mais c’est aussi le manque de perspectives qui nous a pénalisé.  Cela faisait plusieurs années que les producteurs au sein de l’interpro alerte sur le sujet mais l’aval ne réagissait pas. Il a fallu attendre les états généraux de l’alimentation en 2017. Face aux chiffres ils n’ont eu d’autre choix que de se restructurer pour maintenir leurs outils. Depuis 2020 le processus haussier à cette prise de conscience et le manque de disponibilité de la marchandise mais restait la question de la mise en place. Tout le monde avait accepté l’idée de passer des hausses mais personne ne voulait se lancer en premier.

Cette baisse du cheptel était donc actée, entérinée et même validée depuis plusieurs années. Sur ce, arrive l’année 2022 et le contexte que l’on connaît avec des problématiques pour toutes les matières premières. Suite aux états généraux et à partir de 2022, dans un marché déstabilisé où la communication et la désinformation desservent les éleveurs, la contractualisation obligatoire se met en place. Obligatoire, elle l’est toujours aujourd’hui ; mais face à un marché déréglé par la conjoncture, une défiance des acteurs et une non volonté de l’aval...

Pour nous éleveurs, l’objectif n'est pas un prix à l’instant T mais un tunnel de prix où la marge de l’animal est maintenue. A l’origine, l’aval était contre cette contractualisation que nous avons défendue. Tout ce qu’ils souhaitent c’est se sécuriser de l’approvisionnement, la contractualisation telle que nous la proposons le permet mais, ce qu’ils regardent eux c’est le prix de marché or, ce qui est déterminant pour nous éleveurs c’est le coût de production. C’est en fonction du coût de production que l’on peut déterminer notre prix de revient.

Il fallait vraiment des signes majeurs positifs pour arrêter l’hémorragie. En 2022, certes il y a eu une augmentation des prix mais les charges aussi se sont envolées et à l’heure actuelle, passer des hausses reste compliqué."