Les sénateurs Laurent Duplomb (LR, Haute-Loire) et Franck Menonville (UDI, Meuse) se sont entourés des acteurs de la filière agricole pour présenter, le 22 janvier, leur proposition de loi visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur.
En finir avec les surtranspositions, s’aligner sur les normes européennes qu’utilisent déjà les autres Etats-membres, reconquérir une souveraineté agricole et alimentaire sans cesse battue en brèche… Tel est l’objectif du texte que les deux sénateurs ont déposé sur le bureau du Sénat le 1er novembre dernier. Celui-ci contient six articles (lire encadré) et doit être examiné dans les prochains jours. Comme pour mieux faire passer le message, ils se sont entourés des principaux acteurs de la filière qui subissent les affres de ces « diktats » administratifs et réglementaires. Les chiffres parlent d’eux-même : « Sur un potentiel de 13 000 tonnes, nous n’avons pu récolter que 4 200 tonnes des noisettes comestibles », a indiqué Jérôme Bissières, vice-président de Koki. Faute d’acétamipride, la punaise diabolique ravage les vergers. La France ne compte qu’une molécule pour lutter contre cet insecte quand la Turquie, premier producteur mondial en dénombre 240 ! La filière accuse 43 millions d’euros de pertes en deux ans. Les manques de moyens pour la protection des cultures est tout aussi criante dans d’autres secteurs : « On en importe 45 000 tonnes de plants de pommes de terre chaque année », s’est désolé Geoffroy d’Evry, président de l’UNPT. « La surface de production de semis de radis a été divisée par six en six ans, passant de 600 ha à seulement 100 ha », a constaté Anne Gayraud, directrice générale de la FNAMS. Même son de cloche auprès des producteurs de kiwis qui ont vu, à surface égale (3 800 ha), leurs rendements passer de 80 000 tonnes dans les années 1990 à environ 50 000 tonnes maintenant, par la faute de ces surtranspositions, a indiqué Adeline Gachein, directrice du Bureau national interprofessionnel du kiwi (BIK). Que dire de l’effondrement des volumes les pêches-nectarines et abricots français. La production française est passée de 450 000 tonnes en 2000 à 200 000 tonnes en 2024 pour les pêches et nectarines et de 150 000 tonnes à 80 000 tonnes (100 000 les bonnes années) pour les abricots.
« Sentiment d’abandon »
« Déjà en 2019, j’indiquais que les Français consommaient en moyenne 1,5 jour par semaine des produits importés », a rappelé Laurent Duplomb qui veut enrayer le déclin de la Ferme France et s’inquiète de voir « disparaître des pans entiers de l’agriculture française ». Toutes ces surtranspositions pèsent sur la richesse du pays « environ 0,5 % du PIB, soit 110 milliards d’euros par an », a-t-il estimé. Pestant contre cette « France qui se tire une balle dans le pied », il appelle à un sursaut. Le son de cloche est identique chez les agriculteurs qui nourrissent à la fois « de la colère contre ce manque de compétitivité » et un « sentiment d’abandon », a indiqué, Christian Durlin, administrateur de la FNSEA. Il s’inquiète que la sécurité alimentaire soit un axe stratégique des grandes puissances et que ces dernières ne s’inscrivent pas dans les mêmes démarches environnementales que les Français et les Européens. Pour lui une seule ligne prévaut : « Même marché, mêmes règles », a-t-il martelé. C’est d’ailleurs tout l’esprit de cette loi. Les deux parlementaires qui avaient rendez-vous le jour même avec le directeur de cabinet du Premier ministre ont demandé la procédure accélérée. Le texte qui a été cosigné par 192 sénateurs devrait être examiné après le Salon de l’Agriculture, courant mars. Il pourrait, a minima, nourrir le projet de loi d'orientation pour la souveraineté en matière agricole et le renouvellement des générations en agriculture.
Les six points de la proposition de loi Le sénateur Franck Menonville a exposé les principaux articles de la proposition de loi (PPL), en expliquant que le secteur agricole n’était pas le seul à subir les effets des surtranspositions. Pour l’agriculture, voici les principaux points inscrits dans la PPL. 1- Allègement du dispositif séparation vente/conseil 2- Enjeux phytosanitaires avec l’alignement des norme françaises sur les normes européennes. « Nous voulons aussi suspendre, dans certaines conditions, une décision de l'Anses en matière d'homologation de produits phytopharmaceutique », a indiqué le sénateur de la Meuse. 3- Mesures de simplification des installation classées pour la protection de l’environnement (alignement sur les seuils européens) 4- Mettre en place des modalités effectives de recours en cas de contestation des évaluations des pertes de récolte ou de culture, notamment 5- Promouvoir une politique active de stockage de l’eau, qui présente un intérêt général majeur, pour un usage partagé de la ressource permettant de garantir le développement de l’irrigation « Il faut sortir de la dimension idéologique et à la repenser et sécuriser l’accès à l’eau », a précisé Franck Menonville 6- « Apaiser les relations entre l’OFB et les agriculteurs » en privilégiant la procédure administrative. |