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La production de lait biologique structurellement affaiblie

© Photo sous licence CC
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La conjoncture laitière, favorable aux producteurs conventionnels de lait de vache et de lait de chèvre, ne profite pas à leurs collègues convertis en bio. Ils sont de moins en moins nombreux et leurs productions déclinent dangereusement. 

Depuis 2021, les producteurs de lait biologique n’ont jamais aussi peu livré. « Sur les 11 premiers mois de l’année (dernières données disponibles), la collecte accuse une baisse notable de 4,1 % par rapport à 2023 ». Au mois de septembre dernier, les livraisons n’excédaient pas 90 millions de litres. Six mois plus tôt en plein pic printanier, elles étaient mensuellement inférieures de 20 millions de litres à celles de 2022« Un redémarrage de la consommation de produits laitiers bio dans l’Hexagone pourrait survenir », analyse l’Institut de l’élevage dans son dernier numéro Tendances. Cependant, la baisse de la collecte de lait bio, qui devrait se poursuivre, le faible nombre de conversions et les arrêts de certification laissent entrevoir un risque de pénurie de lait bio si la demande venait effectivement à repartir ». Le recours aux importations serait compliqué car la consommation de produits laitiers biologiques progresse chez nos voisins européens.

Des causes plurifactorielles

En France, la baisse de la collecte laitière est plurifactorielle. Durant une bonne partie de l’année passée, les fourrages produits étaient souvent de piètre qualité. Dans l’Est de la France, les troupeaux sont décimés par la fièvre catarrhale ovine. La collecte de lait s’est effondrée de 8 % sur un an. Depuis 2022, les éleveurs laitiers pâtissent d’une conjoncture très dégradée. Economiquement, produire du lait bio ne présente plus d’intérêt particulier. « Le contexte est largement favorable au lait conventionnel », souligne l’Idele. « Sur un an, le prix du lait bio n’a globalement pas évolué alors que le prix du lait conventionnel a augmenté (lire encadré). Le printemps dernier, les 1 000 litres étaient payés 440 € en France quand en Allemagne ils étaient réglés 560 € avant de croître jusqu’à atteindre 650 € en novembre dernier », selon la Commission européenne. Par ailleurs, une partie du lait bio livré en France est régulièrement déclassé. Enfin, l’écart de prix lait biologique-lait conventionnel (50 €/1 000 litres) demeure très faible. Il ne permet plus de compenser le moindre rendement laitier qu’induit la conversion à l’élevage biologique. Au printemps dernier, cet écart était quasiment nul. Or en 2020, le différentiel de prix était de 130 € en moyenne et même de 170 € certaines autres périodes de l’année.

Situation désespérée

« L’accélération de la robotisation et la recherche de volumes de production par ferme, pourraient freiner l’essor de nouvelles conversions vers la bio », note l’Institut de l’élevage. Or, le défi générationnel auquel est confronté l’ensemble de la filière laitière n’épargne pas la section « bio ». On ne dénombre plus que 3 900 livreurs en activité, soit près de 400 de moins qu’en 2022. La situation des éleveurs de chèvre est désespérée. « Les livraisons de lait biologique sont en berne depuis le début de l’année », déplore l’Idele. Ces neuf derniers mois, la collecte mensuelle était  inférieure de 10 % à 16 % à l’an passé. La filière menace de disparaître : seuls 141 fermes livrent encore du lait en France (- 20 % en moins de deux ans). La consommation a baissé de 12 % en moyenne mobile et le prix de vente des fromages de 1,2 %. 

 

Prix du lait en UE : +15,5 % en 2024

Le prix du lait payé aux producteurs européens a augmenté tout au long de l’année passée, selon la Commission européenne.

Sur un an, la hausse est de +15,5 %. Au mois de décembre dernier, les 1 000 litres auraient été payés 555 € (versus 481 € en décembre 2023). La hausse observée à l’échelle européenne a été plus modeste en France (+33 €/1 000 l ; +6,9 %). Le prix des 1 000 litres (523 € au mois de décembre dernier) demeure par ailleurs inférieur de 32 € à la moyenne européenne. Mais au mois de novembre dernier, la marge Ipampa sur coût indicé (MILC) avait davantage progressé (+ 40 €/1 000 l) car les charges ont diminué de 16 €/1 000 l et le produit de la viande a augmenté.